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Surdouance et TDAH : ne plus confondre

7 février 2022Psychiatrie, Société,

Les surdoués seraient particulièrement émotifs, se sentiraient en décalage avec leurs pairs et éprouveraient de nombreuses difficultés d'adaptation. Les caractéristiques qui sont souvent attribuées à la surdouance ressemblent pourtant à celles du TDAH. Comment les différencier ?

 


Surdoué, haut potentiel intellectuel (HPI), précoce ou encore "zèbre", les termes sont nombreux pour qualifier la haute performance intellectuelle. Celle-ci est définie par l'obtention d'un QI égal ou supérieur à 130 suite à la passation des tests officiels, auprès d'un psychologue. Le HPI est une caractéristique cognitive et non un diagnostic médical.

Le TDAH est un trouble attentionnel dont la présentation est variable, parfois accompagné d'hyperactivité et d'impulsivité. Il se traduit par un handicap fonctionnel dans plusieurs domaines de la vie quotidienne. Le TDAH est un diagnostic référencé dans les manuels de classification de psychiatrie.

De nombreux thérapeutes affirment encore aujourd’hui que la performance intellectuelle pourrait être un fardeau, avoir des impacts négatifs sur le bien-être, sur l’intégration sociale, la scolarité et sur la vie professionnelle. Pour ces professionnels, être identifié HPI ouvrirait la voie à des accompagnements thérapeutiques spécifiques, à des solutions qui amélioreraient leur quotidien.

 

Le HPI : un effet Barnum¹ ?

Les principaux traits attribués aux HPI, censés expliquer leur différence et leurs difficultés d’adaptation sont : l’hypersensibilité (la dysrégulation émotionnelle), une plus grande fragilité face aux aléas de la vie, une plus grande anxiété que la population générale, une pensée en arborescence, le fait que les pensées ne s’arrêtent jamais de tourner, une faible estime de soi provenant d’échecs supposément dus au décalage entre les capacités et les demandes scolaires, sociales ou professionnelles. Les HPI sont aussi considérés comme étant naturellement plus créatifs, cette créativité pouvant elle aussi générer frustration et décalage.

Cependant, beaucoup de personnes en souffrance peuvent se reconnaître dans ces particularités, surdouées ou non. Les traits supposément propres aux HPI sont en fait peu spécifiques, ils couvrent un champ très vaste de difficultés, sans lien de causalité avec la performance cognitive. Il a été montré par la recherche que le haut potentiel intellectuel est même un facteur de protection contre la dépression, l’anxiété, les difficultés d’adaptation et d’intégration. Concernant la créativité, il n’y a pas de preuve à ce jour de son lien avec l’intelligence².

 

Le business du dépistage de la surdouance

L’affirmation que le HPI pourrait être à l’origine des difficultés de la personne n’est pas sans intérêt pour certains professionnels. Un portrait flou du surdoué facilite le développement d’une économie du test, accompagnée de suivis en séances ou de divers protocoles thérapeutiques supposés adaptés, mais sans preuve de bénéfice en lien avec le HPI (psychanalyse, neurofeedback, diverses méthodes de développement personnel, etc.).

La défense de ce marché de la douance peut être délétère pour le bien-être des personnes qui consultent, et pose des questions éthiques. L’attribution d’une souffrance à une spécificité qui n’en est pas la cause est susceptible d’entraîner un attachement à une image déformée de soi, qui peut aggraver les difficultés. Par ailleurs, certains qui se reconnaissent dans les "symptômes HPI" n'ont pas nécessairement un QI plus élevé que la population générale. Ceux-ci se retrouvent alors arbitrairement exclus d’une population idéalisée. Le coup à l’ego est à même de contribuer à la souffrance, alors que l’idéalisation entretient une fracture sociale qui n’a pas lieu d’être.

La majorité des thérapeutes pense bien faire en imputant des difficultés socio-adaptatives au fonctionnement intellectuel. Pourtant, une identification erronée des causes des difficultés peut s’avérer néfaste. Le risque est que la personne, déjà vulnérabilisée par sa souffrance se retrouve en situation d’attente perpétuelle, dans la mesure où l’accompagnant ne procèderait pas à l'investigation des causes réelles des troubles³.

 

Le HPI et les troubles réels

Le mythe du surdoué semble s’être façonné à partir d’une combinaison de traits qui appartiennent à des troubles qui sont bien identifiés aujourd’hui, et qui impactent réellement le quotidien des personnes.

  • les troubles de l’humeur, l’irritabilité, les interactions sociales insatisfaisantes ou défiantes, le repli sur soi, les ruminations, l’inconfort du vécu corporel, une image de soi déformée, etc. peuvent avoir pour origine un état dépressif, un trouble de la personnalité, un trouble du stress post-traumatique,
  • le souci du détail et de la perfection, la préoccupation constante entraînant un ressassement de pensées, l’hypervigilance, etc. peuvent trouver leur origine dans des troubles anxieux,
  • la pensée qui tourne sans arrêt, l’impatience et le sentiment permanent de frustration, la passion profonde pour des sujets ou des activités qui rendent les personnes très compétentes dans certains domaines spécifiques, les comportements sociaux décalés, etc. peuvent correspondre à des troubles anxieux, à un TDAH ou partiellement à un trouble du spectre de l'autisme (TSA) tel qu’il est défini aujourd’hui,
  • la pensée dite "en arborescence", c'est-à-dire par associations d'idées est la norme, elle n'est pas typique du HPI,

L’ensemble de ces symptômes ou difficultés ne sont pas liés à un QI particulier, ils sont répartis uniformément sur la courbe de l’intelligence. L’état dépressif, les troubles anxieux et le TDAH sont les trois troubles psychologiques les plus communs, loin devant des troubles souvent considérés fréquents tels que la schizophrénie, la bipolarité ou le TSA. Il n’est pas difficile pour certains professionnels de les amalgamer à la douance : la population présentant ces troubles en parallèle de leur HPI existe bel et bien, et elle représente un marché important⁴.

 

Différencier la surdouance et le TDAH

La confusion entre le TDAH et le HPI pourrait être la conséquence d’un "biais de recrutement" : de nombreuses personnes ayant des troubles de l’attention (4% de la population), et par ailleurs un haut QI (2,3% de la population) ont pu consulter des professionnels qui auraient assimilé la douance avec l'expression clinique du TDAH. Il est vrai que le TDAH a de nombreux impacts sur le fonctionnement de la cognition, et que les tests d’intelligence convoquent essentiellement les capacités cognitives. Toutefois le TDAH impacte également d’autres compétences (motrices, émotionnelles, sociales, etc.) et a une signature bien spécifique sur le comportement de la personne dès le plus jeune âge. À l’opposé, les signes cliniques permettant réellement de détecter l’influence d’un haut potentiel dans le développement de la personne sont peu nombreux et permettent de bien distinguer le HPI de toute autre particularité neurologique ou psychologique (source des critères suivants précisée dans les références⁵) :

  • une précocité du développement moteur (une avance de 1 à 2 mois dans le développement de la motricité fine et globale)
  • des particularités dans la neuromotricité néonatale : mise en route précoce de la motricité volontaire
  • un regard accrocheur et une vivacité dans la poursuite visuelle
  • une disparition précoce des réflexes archaïques

À l’âge adulte, une personne avec un HPI ne présente pas de spécificité psychologique particulière autre que ses performances intellectuelles. Le HPI peut cohabiter avec de nombreux troubles qui n’ont pas d’impact sur le développement de l’intelligence. Une gêne ou un handicap doit motiver le professionnel à déterminer quelle peut être son origine indépendamment d’un HPI.

Il est important de souligner que si TDAH et haut niveau d’intelligence peuvent cohabiter, les difficultés d’attention sont susceptibles d’impacter le quotient intellectuel. La capacité d’attention, chez le TDAH, est grandement influencée par le contexte. Elle dépend bien plus de la motivation que pour les personnes non TDAH. L’absence de motivation pour un TDAH peut déboucher sur un déficit exécutif, une incapacité à agir ou même à penser. Une personne avec un TDAH qui n’éprouve pas suffisamment de satisfaction à la passation de tests de QI peut se retrouver en échec, en particulier face aux sous-tests sollicitant l’attention soutenue. Si le professionnel n’est pas formé aux spécificités du TDAH et à l’influence de la motivation sur la performance, il pourra mal interpréter ces échecs et attribuer à la personne un QI inférieur à ses capacités réelles. À l’inverse, une personne avec un TDAH qui trouverait les tests particulièrement stimulants obtiendrait un résultat qui correspond à son niveau de performance le plus élevé⁶. Ce résultat serait trompeur, dans d’autres circonstances moins motivantes cette même personne se retrouverait en échec. Là encore, un professionnel qui ne connaîtrait pas le TDAH passerait à côté des difficultés réelles de la personne.

 

Les zèbres : une espèce en voie d’extinction

Retenons qu’à ce jour le résultat d’un test de QI, même lorsqu’il est élevé, ne donne pas d’information sur l’origine des difficultés rencontrées. Accéder à la complexité du fonctionnement cognitif d’une personne, de surcroît en souffrance, implique une analyse détaillée et approfondie des résultats aux tests, accompagné d’autres méthodes d’exploration des difficultés. La stratégie la plus pertinente intègrerait sans doute l’ensemble de l’histoire de la personne, tiendrait compte de l’influence du contexte et se délesterait de toute mythologie sur les supposées particularités associées à un niveau de QI. Une approche dimensionnelle et non catégorielle faciliterait quoi qu'il en soit l'accès au meilleur accompagnement possible et limiterait le risque d’errance ou de prolongement de la souffrance.

 

Lucile Hertzog & Vincent Mignerot

 

 

Références

1. Effet Barnum (définition Wikipédia) : "Biais cognitif induisant toute personne à accepter une vague description de la personnalité comme s'appliquant spécifiquement à elle-même."

2. Voir la synthèse de ce Webinaire sur la psychologie du Haut Potentiel.

3. Elisabeth Feytit propose avec Méta de Choc de diagnostiquer et dénoncer les mécanismes de manipulation et de mise sous emprise omniprésentes dans nos sociétés, en particulier dans les domaines du soin, de la psychologie et du développement personnel.

4. Les principaux troubles sont listés et définis sur cette page du site TDAH à l’âge adulte.

5. Voir la synthèse de ce Webinaire sur la psychologie du Haut Potentiel.

6. Milioni AL, Chaim TM, Cavallet M, de Oliveira NM, Annes M, Dos Santos B, Louzã M, da Silva MA, Miguel CS, Serpa MH, Zanetti MV, Busatto G, Cunha PJ. High IQ May "Mask" the Diagnosis of ADHD by Compensating for Deficits in Executive Functions in Treatment-Naïve Adults With ADHD. J Atten Disord. 2017 Apr;21(6):455-464. doi: 10.1177/1087054714554933. Epub 2016 Jul 28. PMID: 25359760.

 

Autres références

  • Cerveau & Psycho n°136, Octobre 2021 : Dans la tête d’un surdoué – Que disent les neurosciences sur le haut potentiel intellectuel ?
  • Stephen Faraone, American Professional Society of ADHD and Related Disorders : Smart People Can Have ADHD Too
  • Franck Ramus et Nicolas Gauvrit : Version originale et intégrale d'un article paru dans La Recherche, Mars 2017, sous le titre "La légende noire des surdoués"
  • Franck Ramus : Les surdoués ont-ils un fonctionnement cérébral qualitativement différent ? - Articlé publié dans : Ramus, F. (2018). Les surdoués ont-ils un cerveau qualitativement différent ? A.N.A.E., 30(154), 281‑287.

 

Vidéos en ligne

  • Avoir un haut QI : chance ou malchance ? par Franck Ramus
  • Les caractéristiques du HQI, mythes ou réalités ? par Nicolas Gauvrit
  • La pathologisation de l’intelligence, une dérive actuelle ? par Nadine Kirchgessner
  • Contes et légendes de l'intelligence, avec Stéphanie Aubertin par Méta de Choc
  • Commentaire sur la conclusion d'Olivier Revol au webinaire "HP confinés" par Franck Ramus
  • Comment reconnaître un adulte surdoué ou HP (haut potentiel) ? par Charlotte Parzyjagla
  • Qui sont les enfants à haut potentiel par Nicolas Gauvrit

 


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